Vichy > Son patrimoine > Hôtel des Ambassadeurs
Même si sa date d’ouverture reste incertaine, l’hôtel des Ambassadeurs rallie la clientèle la plus exigeante dès son apparition dans les guides du curiste en 1858. Construit pour la famille Roubeau-Place face au « jardin de la musique » du casino, sa façade néo-classique en brique et pierre blanche figure parmi les plus connues de la cité vichyssoise.
Idéalement situé en bordure du parc thermal, l’établissement s’agrandit en 1866 pour l’ouverture de la saison; en 1867, le Programme de Vichy fait état de deux cents chambres et vingt salons. Depuis les fenêtres et les balcons ouverts sur l’extérieur, les clients peuvent entendre les concerts donnés dans le nouveau kiosque. Cet intermède musical se prolongeait régulièrement sous la galerie métallique qui entoure le patio central de l’hôtel.
Les bâtiments sont disposés selon un plan carré autour du patio, les pièces de réception du rez-de-chaussée profitant de la luminosité de ce jardin intérieur. En 1880, ses propriétaires* accolent « Continental » à son nom, qui devient le « Grand Hôtel des Ambassadeurs et Continental ». Les aménagements se succèdent. Outre les deux cents couverts de sa salle-à-manger, il s’enorgueillit de pouvoir accueillir cinq cents personnes dans son salon des fêtes. Ses hôtes disposent d’une salle de billard et d’un fumoir, tandis que des écuries avec boxes et stalles font partie des services proposés. Des attelages sont mis à la disposition des amateurs d’excursions, un omnibus assurant des navettes quotidiennes avec la gare. En 1890, l’établissement doté du téléphone figure parmi les premiers à s’équiper d’un ascenseur qui dessert ses quatre étages surmontés de combles. Ses chambres, déjà pourvues d’un cabinet de toilette, bénéficient du chauffage en 1897 et « en 1900, MM. Roubeau et Collet* annonçaient que l’hôtel était entièrement éclairé à la lumière électrique. » (Cf. Jacques Cousseau dans Palaces et Grands Hôtels de Vichy)
Pour recevoir des familles désireuses de préserver leur intimité tout en profitant des services de restauration et d’hôtellerie, plusieurs villas sont construites à proximité. Entre 1898 et 1912, après le Castel Flamand conçu par l’architecte parisien Ernest Mizard rue de Belgique, trois autres villas sortent de terre boulevard de Russie et rue d’Italie. Chacune d’entre elles se trouve reliée à l’hôtel par des passages souterrains créés par l’hôtel à ses frais avec l’autorisation de la Ville.
De 1914 à 1918, Les Ambassadeurs sont réquisitionnés à l’instar de la plupart des grands établissements vichyssois. Ils abritent l’hôpital temporaire n°45 où le professeur Lemaitre, spécialiste en chirurgie de la face, répare les « gueules cassées » de la Première Guerre mondiale. Durant la Seconde Guerre, l’hôtel au nom prédestiné va servir de siège au corps diplomatique du gouvernement du Maréchal Pétain : des ambassadeurs, envoyés extraordinaires et autres ministres plénipotentiaires occupent alors les lieux.
Les travaux de modernisation entrepris pendant l’Entre deux-guerres, aux alentours de 1925, concernent principalement le rez-de-chaussée. Des colonnes à chapiteaux sont dressées et une grande verrière « Art déco » signée Francis Chigot illumine le grand escalier dont la rampe en ferronnerie est refaite. Ces pièces du rez-de-chaussée avec leur décor sont inscrits au titre des Monuments historiques depuis 1991: le grand hall d’entrée avec ses luminaires, son escalier et ses vitraux de Chigot, le grand salon, le petit salon avec son décor peint, l’ancienne salle de restaurant et le patio. Le film réalisé en 1996 par Roger Vadim Mon père avait raison d’après Sacha Guitry a été tourné dans ces lieux.
Les activités hôtelières ont définitivement cessé après 1986, l’endroit restant inoccupé jusqu’en 1998, date à laquelle il est vendu par appartements. C’est sous cette forme que l’ancienne salle à manger désertée depuis une trentaine d’années est achetée. Les propriétaires en font un bar d’ambiance chic et cosy ouvert au public en mars 2010. « Venu y boire un verre avec un ami en juin 2019, j’apprends qu’il est à reprendre. J’ai aussitôt décidé de racheter le fonds de commerce pour lequel j’ai signé le mois suivant ! » Gérard Barthomeuf travaille dans l’hôtellerie-restauration depuis les années 90. « Ma femme et moi sommes tombés sous le charme de cet établissement qui a gardé son âme. Les clients sont sensibles à son cadre raffiné, à la fois intime et convivial. L’un d’eux, ancien maître de rang du restaurant de l’hôtel des Ambassadeurs, m’a dit avoir servi dans cette salle le cosmonaute Youri Gagarine. »
Aux Ambassadeurs, la clientèle nocturne se retrouve pour écouter de la musique, jouer au billard ou discuter sous son haut plafond et ses moulures, témoins d’une histoire qui continue …
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